Une info pour qui ? Une info pour tous !

Si l’accessibilité à l’information est un principe d’accès aux droits et à la citoyenneté, c’est encore plus vrai pour la presse territoriale, destinée à tous les habitants d’un territoire. On vous demande quelle est la cible, vous répondez : “le grand public”. Il s’agit donc d’écrire pour un lectorat à l’image de la société dans ce qu’elle a de plus large. Mais au fond, ce grand public, qui est-il ?

Dans le souci qu’elle soit comprise par toutes et tous, la presse territoriale doit savoir s’affranchir des frontières sociales, culturelles, de niveaux d’éducation ou de centres d’intérêt de ses lecteurs. C’est ainsi qu’elle peut prétendre remplir son rôle, à savoir s’adresser à tous les habitants de la collectivité, et les concerner. 

Une mission simple à résumer, mais un sacré défi à relever : face à un lectorat aussi insaisissable et hétérogène, comment s’y prendre ?

Trois constats

  1. Les différences de niveaux d’éducation ne cessent de croître

Estimer le nombre de mots connus par un hypothétique “Français moyen” est particulièrement délicat. D’une source à l’autre, les chiffres varient du simple au décuple. En creux, elles s’accordent sur une chose : les inégalités de vocabulaire sont criantes d’un individu à l’autre.
Une situation d’injustice qui semble partie pour durer. En cause, un déterminisme social à toute épreuve qui génère des difficultés croissantes d’accès à l’éducation supérieure (dans les grandes écoles, 65 % des étudiants proviennent d’un milieu favorisé, et 8 % d’un milieu défavorisé). L’OCDE considère qu’il faut compter 6 générations pour qu'un descendant de famille pauvre atteigne le revenu moyen en France, d’après un rapport datant de 2018. Quoi qu’il arrive, la situation scolaire est alarmante dès le plus jeune âge : on estime la proportion d’élèves en difficulté scolaire à 20 % !


2. Le français n’est pas la langue maternelle de tout le monde

Faut-il vraiment le rappeler ? Certains contributeurs de la société et résidents de leur territoire, Français ou non, ne maîtrisent pas le Français. Pourtant, ils ont droit à l’information au même titre que tous les autres. L’Insee considère que seulement 7 % des immigrés ont des parents qui leur parlaient exclusivement français, contre les trois quarts qui s’adressaient à eux exclusivement dans une langue étrangère.

3. En France, on compte 12 millions de personnes en situation de handicap

Soit 20 % de la population. Dans cette proportion, on pense notamment aux personnes déficientes visuelles ou intellectuelles, particulièrement touchées par ce déséquilibre d’accès à une information écrite.

Il est de la responsabilité des institutions de ne pas en rajouter une couche à la fragilité de ces publics. Au contraire. À nous, responsables politiques et communicants publics, de faire en sorte qu’ils soient acteurs de leur société en mettant à leur disposition des supports d’information adaptés : langage clair, caractères agrandis, contraste suffisant, etc.

Des contenus rédigés dans un langage clair peuvent être tout aussi riches. Il s’agit surtout de changer ses habitudes : parier sur des mots simples, des phrases courtes et une syntaxe directe, des phrases actives.

Quelles solutions ?

Les outils numériques

Sur le web, des alternatives de mise en forme permettent de diffuser l’information au plus grand nombre : lecture audio, options pour la prise en compte des problèmes de vue, ou bien langage écrit s’adaptant aux troubles dys (dyslexie, dysorthographie, dysgraphie, dyspraxie…), etc.

Les bonnes pratiques du Falc

En 2020 et 2021, devant l’ampleur inédite du besoin d'information publique, la pandémie a remis au goût du jour les outils Facile à lire et à comprendre (Falc). Il s'agit d’un format adapté aux personnes avec des difficultés de communication ou de compréhension.

Les principes fondamentaux de cette méthode reposent sur deux dimensions :

  • Facile à lire : mise en page aérée, taille de police, illustrations associées aux textes ;

  • Facile à comprendre : le choix des mots, la construction des phrases, l'organisation des informations.

Consultez des exemples sur les sites santebd.org, ou gouvernement.fr/info-coronavirus, sur certaines pages du site du ministère de la Culture, et même sur des sites de maisons d’édition, entre autres.

Les aides visuelles

De l’utilisation de pictogrammes à la facilitation graphique en passant par les photos, les schémas, les data-visualisations ou les infographies, on le sait, une image est parfois bien plus parlante que des mots.

Les aides visuelles sont d’ailleurs largement utilisées en pédagogie et dans le monde de l’éducation : elles sont d’une importance capitale dans la manière de tenir les informations. Plus concrets que les mots, couleurs, personnages ou icônes facilitent la compréhension ou soutiennent le sens porté par le texte.

Des bénéfices pour toutes et tous

En dehors des personnes qui rencontrent des difficultés spécifiques, notons qu’une information accessible satisfait les nombreux avides d’une information rapide et digeste. Personne ne s’est jamais plaint d’un texte très facile à lire, si ?

Finalement, s’adresser dans un langage clair et net à toutes et tous, sans distinction, pourquoi s’en priver ?

Pour aller plus loin

Certaines publications de presse territoriale font le choix de l’inclusion au prix de petits efforts et n’hésitent pas à intégrer les pratiques vues ci-dessus. En voilà quelques exemples : 

  • “Nous Vous Ille”, le journal du département d’Ille-et-Vilaine, est disponible en lecture audio pour les personnes malvoyantes ; c’est aussi le cas des “Nouvelles”, le magazine de Lorient agglomération.

  • vivrenimes.fr, le site web du magazine de la ville de Nîmes, propose quant à lui un ingénieux menu d’accessibilité avec plusieurs options : agrandissement des polices, ajustement du contraste, “mode dyslexie”, etc.

  • Pour sa part, spécialisée dans l’information inclusive depuis plus de 20 ans, l’association Lilavie propose des journaux écrits avec des mots simples et des phrases courtes. Une actualité particulièrement adaptée aux résidents d’Ehpad, personnes en situation de handicap mental ou psychique, en difficulté avec l’écrit, ou sourdes.

Sources : 

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Sobriété éditoriale : quand moins, c’est plus !